Le musée national de la Marine conserve en dépôt du musée du Louvre treize des quinze toiles qui forment un ensemble qui devait initialement en comporter vingt-quatre, témoignages de l’ambition maritime française retrouvée. Un itinéraire très précis avait été établi par la Direction des Bâtiments lors de la commande, et les premiers plans devaient montrer dans le détail les activités propres à chaque région.

À travers ces scènes d’une grande richesse documentaire, la perfection esthétique se met au service de la politique et de l’instruction royale et nous fait voyager dans un temps et un espace d’une France rêvant encore à de grandes aventures maritimes que la guerre de Sept Ans (1756-1763) vient brusquement freiner.

Ces tableaux transportent le spectateur dans un monde révolu où les scènes de genre le disputent à la précision scientifique et technique. Prospérité et abondance imprègnent ces œuvres où les échanges commerciaux sont omniprésents et notamment l’import des denrées lointaines ou exotiques.

Il s'agit de l'une des deux vues du port de Marseille exécutées par Vernet en 1754 et pour laquelle le peintre a suivi les instructions de l'itinéraire.

La vue est prise légèrement en surélévation, du haut du pavillon de l'Horloge dominant le quai, pour embrasser toute la largeur du port. Une grande variété de marchandises est présentée dans des jarres, jattes, ballots ou même en vrac pour les céréales, venant de tout le pourtour méditerranéen. Les pavillons distinguent la nationalité des navires et sur le quai évolue une foule bigarrée, dont les costumes évoquent l’Orient et qui se mêle aux employés du port, aux teneurs d'échoppes et à quelques élégants badauds, parmi lesquels l'artiste s'est dessiné avec sa femme Virginie et son fils Livio.